Minimalisme : faisons le point en ce début 2019

Nous sommes en 2019 et l’essor franc et massif du minimalisme doit dater de 2011 ou 2012. Il y a bien sûr des pratiquants du barefoot (course pieds nus) ou des adeptes de Five Fingers (Vibram à 5 doigts) depuis des années, mais l’essor commercial (produits, publicités) a attiré il y a quelques années seulement les non-initiés.

Je vous propose de refaire le point pour vous éclairer sur le sujet, s’il en est possible, dans son actualité de 2019.

 

 

Pour qui ? Et… pourquoi ?

Ce qu’il faut commencer par dire, c’est que passer à des drops plus faibles, des chaussures plus basses et moins tendres, puis pratiquer vraiment le minimalisme, ça doit venir d’une vraie démarche dans un intérêt de santé et de bien-être sportif. Si vous êtes bien avec vos chaussures actuelles et que vous ne vous blessez pas, ne changez pas ! Passer au minimalisme demande de perdre des repères et des habitudes que votre corps a enregistré pendant des années.

Sinon, concrètement, les avantages de cette pratique, après transition, sont nombreux :

> Meilleur positionnement du corps, moins d’impact ostéo-articulaire, renforcement tendineux, douleurs diverses (genoux, tendons d’Achille, dos…) qui s’améliorent ou disparaissent, économie gestuelle et donc énergétique. On parle d’un résultat final, qui vient au bout d’une transition longue, patiente, passant par des phases douloureuses ou possiblement par des blessures.

Il faut le rappeler car des sujets aussi sérieux sont parfois pris à la légère quand on est intrigué par cette pratique. Combien de personnes a-t-on déjà pu voir en magasin, venir chercher des Five Fingers en ayant dans l’idée que c’était ce qui leur fallait. Ce n’est pas un « trip » que l’on s’offre ou comme un produit miracle qui, après quelques footings, va faire disparaître les problèmes ! Malheureusement non…

 

Les risques

> Se mettre trop rapidement à courir pieds nus comme on le ferait avec des chaussures classiques va agresser le corps de façon franche. La position du corps se trouve changée et les sollicitations des tendons démultipliées. Ne serait-ce qu’au niveau du tendon d’Achille : sans l’épaisseur habituelle et la hauteur sous le talon, l’étirement sera plus marqué et un levier plus important appliquera plus de force sur cette zone.

Les premiers dégâts seront du type tendinite. Mais on peut aller jusqu’à la déchirure musculaire ou la fracture de fatigue pour les os du pied, voir le tibia. Ce qui fait vite déchanter… Les blessures, l’inactivité qu’elles exigent et la patience sont souvent très compliquées à vivre.

 

Que faut-il faire ?

ÊTRE PATIENT ! Puisque l’on a grandi depuis tout jeune avec des chaussures à ses pieds, il va falloir PROGRESSIVEMENT éduquer le corps et l’habituer à fonctionner différemment.

Premièrement, avant de pouvoir parcourir des dizaines de kilomètres en produits minimalistes ou pieds nus, il ne faut pas négliger la transition nécessaire.

> Des chaussures existent désormais avec moins de hauteur du talon par rapport à l’avant du pied (le fameux « drop »), et également moins d’épaisseur de semelle, de maintien. Le but est de redonner une posture plus « naturelle » et de redonner de la liberté et de l’autonomie au pied.
Commencer par des produits avec des drop de 8 mm me paraît intéressant. On sent une attaque du talon moins franche. Ensuite, une fois cette paire usée, vous pourrez vous intéresser à des drops de 4 mm. Les marques Saucony ou New Balance, par exemple, proposent des chaussures avec ces drops, tout en gardant une certaine épaisseur protectrice (et en étant un peu ferme, car une semelle trop molle allonge le temps d’appui au sol).

Deuxièmement, si vous voulez passer par un club d’athlé, on vous apprendra quelques exercices d’appuis qui visent à renforcer naturellement le corps. Sinon, vous pouvez déjà commencer par des footings pieds nus sur de l’herbe. Quelques minutes pour commencer. Vous remarquerez qu’avec des faibles drops et encore plus pieds nus, votre foulée va se raccourcir, augmenter en cadence pour multiplier les appuis, moins s’élever et la pose du pied se fera plus vers l’avant ou en médio-pied.
> de cette façon, le corps se protège des chocs et cherche à être le plus efficient possible. Efficient, c’est à dire à la fois efficace et économe.

 

Troisièmement, avant de passer sur des Five Fingers, vous pourrez viser des drops 4, 3 puis zéro avec des semelles fines et des chaussants plus larges.

Photo « vintage » d’Anton …!

Il y a des marques comme Inov-8, Altra, Newton, Merrell qui peuvent être intéressantes. Le cerveau, moins « coupé » du sol, récupérera plus d’informations (proprioception) et le corps se renforcera.
Les Five Fingers ont très peu d’épaisseur (entre 2 mm et 4 mm) et auront pour but de récupérer toute sa fonction. Séparer les doigts pour les enfiler chacun dans un espace (attention, ce n’est pas si évident !) vont leur redonner mobilité et fonction. Le pied va s’étaler au fil du temps sur la largeur, pour augmenter la surface d’appui (alors que dans des chaussures classiques on comprime les doigts).

 



IMPORTANT
= il est compliqué de faire marche arrière ! Une fois habitué à ce type d’utilisation, remettre des baskets classiques et à talons devient compliqué. Inconfort et changement de position (encore !). On peut bien sûr utiliser les Five Fingers de façon moins poussée ou pour travailler sa foulée sans aller vers une « transformation » définitive. Tout de même, l’impact d’une chaussure avec une certaine épaisseur ou un drop élevé est plus faible pour celui qui a transité vers une foulée médio-pied. Les produits aident, mais  c’est bien sûr l’éducation et la pratique qui compte.

Quant à l’utilisation pieds nus complète
, il faudra encore plus de temps pour que la corne se fasse et vienne protéger le pied des éléments divers sur le sol qui pourraient blesser ou abîmer la peau.

Comme vous le voyez, pour aller au bout de l’idée, il ne faut pas quelques semaines mais plusieurs années !

> Relire l’interview de Yann, le barefoot traileur.

 


Réflexion…

Si le but est de faire disparaître des douleurs, attention à la transition. Toutefois, il y a un paquet de coureurs (et c’est la majorité) qui courent sans aucune douleur ni blessure en utilisant des baskets tout à fait « classiques ». Pour ceux-là, il n’y a aucune raison de changer comme nous le disions au début.

L’influence du minimalisme a fait du bien sur les conceptions de chaussures qui sont devenues plus légères et qui proposent désormais sur la plupart des marques des modèles avec différents drops. Le choix est peut être plus important mais on peut mieux cibler.

On n’est pas obligé de rentrer à fond dans l’expérience. Mais il est vrai qu’avec un drop entre 4 et 8, c’est intéressant pour l’économie de course. L’appui est moins long au sol en transitant moins par le talon. Par contre, j’ai pu tester des chaussures avec un drop faible mais une semelle trop amortie ou trop molle, le gain se réduit car une semelle de ce type, en s’écrasant plus, allonge le temps d’appui, ce qui est contre-productif.

Concernant l’efficacité en terme de performance, ce n’est pas toujours garanti ! Souvent, on arrive à courir médio-pied ou avant-pied à des allures d’endurance (on s’applique, la vitesse est basse). Ou bien, à l’opposé, à des allures de vitesse (où l’appui est court et l’effort est bref). Entre les deux, à des intensités élevées mais prolongées, l’impact au sol est plus subi et moins facile à conserver, la fatigue plus importante, ce qui rend très difficile la course sur l’avant-pied. D’ailleurs, l’économie de course n’est pas forcément vérifiée.
On a même pu observer chez certains coureurs kenyans de haut niveau qu’ils avaient un appui proprioceptif plus « talon ». Par contre, le temps d’appui restait bref, et donc moins subi, et c’est bien là l’essentiel : rester peu de temps au sol, être actif.

En gros, il faut tendre vers une foulée moins traumatisante (médio-pied) et viser un meilleur positionnement du corps, un meilleur relâchement et une meilleure efficacité. Le renforcement musculaire doit intervenir. Des drops entre 4 et 8 mm sont intéressants sur une paire de running avec une utilisation classique. Les exercices de foulées, de montée de marches, les côtes et… être à l’écoute de votre corps. Ecoutez, il vous parle !

 

 

 

Bilan

Ceux qui souhaitent faire la démarche jusqu’au bout peuvent le faire. Pour regagner la totalité de son autonomie et courir naturellement de longue distance de cette façon, on a compris que ça prenait du temps.

Sinon, il n’y a pas de foulée idéale (y compris l’appui). On chasse souvent l’attaque par le talon, mais il faut avoir une façon plus globale. Une personne chez qui l’appui serait « plutôt » talon, qui serait bref et dont la jambe serait déjà un peu pliée au moment de l’amorce pourrait avoir une foulée plutôt efficace et économe. Nous n’avons pas tous la foulée de Mo Farah, qui d’ailleurs est très élastique et consommatrice d’énergie.

Bref, la démarche globale, y compris l’appui et les chaussures qui sont les éléments de contact et d’équilibre, est intéressante tout de même à travailler.

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On a développé aujourd’hui l’idée de l’indice minimaliste (< A LIRE) pour les runnings :

« La chaussure minimaliste est une chaussure interférant minimalement avec les mouvements naturels du pied, de par sa grande flexibilité, son faible dénivelé (drop), son faible poids, sa faible épaisseur au talon, et l’absence de technologies de stabilité et de contrôle du mouvement ».

Voici surligné en bleu les 5 critères que vous pouvez évaluer sur vos paires de running. Cliquez sur le lien et laissez vous guider.

> Je trouve cet « indice » intéressant, même si on on peut avoir une petite différence d’appréciation, car au final ce sont vraiment ces critères qui nous turlupinent et nous indiquent vraiment si la chaussure convient dans cette démarche.

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>> Pour échanger ou pour toutes questions ou remarques, n’hésitez pas à commenter.

Si mon expérience vous intéresse, si vous voulez collaborer ou proposer un test produit, contactez-moi

6 commentaires sur « Minimalisme : faisons le point en ce début 2019 »

  1. Pour ma part je suis passé au minimaliste avec peu de difficultés. Simplement, la foulée se fait en cycle arrière en pensant à pousser le pied derrière sans chez à l avancer. La fréquencd de la foulée doit être plus importante pour économiser les tendons. Je me suis fait surprendre la première fois avec des saucony. J ai essayé le pied nu et c est génial. La sensation direct avec le sol, la température etc c est magique. Par contre le pied chauffe vite. Le seul hic est ma gestion des descentes avec un faible drop car la le talon ramasse les chocs directement. Il faut se forcer à poser l avant du pied en premier. Enfin pour le trail l idéal à mon avis est un drop de 4 à 8 mm ac un peu d épaisseur pour ne par sentir les cailloux. Pour les chemin gravé et plat, essayez les sendales home les tahahumaras c est le top ! C est la sensation du pied nu avec la protection contre les graviers.

    Aimé par 1 personne

    1. Merci pour ce passage sur le site !
      Finalement le cycle de foulée se fait lui aussi naturellement, on remarque bien que le corps est intelligent. Il est plutôt neutre car ce qui se fait en arrière n’est pas à exagérer, et l’appui se fait très proche du centre de gravité, c’est aussi pour ça que l’on doit rythmer plus les foulées.

      Quand on a transité vers l’avant au final c’est simple en descente car l’avant du pied étant renforcé, on cherche plus à poser celui ci. Je pense que globalement le drop de 4 mm est le meilleur, avec une épaisseur moyenne (voir moins, sauf sur pierrier montagneux). Pas encore testé les sandales mais l’expérience doit être top !

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    2. Je pense que pour la descente, le drop est pas hyper important. Sur des descentes techniques, quelque soit la chaussure, il faut privilégier les appuis fréquents et courts, et sur tout type de descente, un léger déséquilibre avant. Quand on arrive à faire ça, on va plus facilement attaquer « de l’avant », et ce avec n’importe quelle chaussure.

      Concernant la caillasse… C’est une affaire d’adaptation ! Il m’a fallu un bon moment avant d’être complètement à l’aise sur des terrains très technique avec mes trails glove. A force, même avec pas mal de fatigue, on arrive à « passer » sans soucis dans la caillasse. Désormais, c’est quand je sors les VFF dans ce genre de terrain que ça peut devenir un peu plus difficile avec la fatigue. Mais outre les sensations qui sont vraiment excellentes (rien à voir de ce coté là avec les « grosse » chaussures), courir dans de la caillasse avec des chaussures vraiment légère est, je pense, vraiment bénéfique en ce qu’il permet de travailler le renforcement du pied et de la cheville. On devient + fort + longtemps, + agile aussi.

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